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La grande distribution est à la conquête de ses nouveaux marchés




Mercredi 18 Avril 2012


Le service au volant a la cote dans les filières de la distribution. Déployé en complémentarité avec une fonction de commande en ligne, le « drive », comme on l’appelle aujourd’hui en France, fait florès parmi les enseignes françaises de la grande distribution. En témoignent d’ailleurs à titre d’exemple, les projets du groupe Auchan pour l’horizon 2014.



La grande distribution est à la conquête de ses nouveaux marchés
Les leaders français de la grande distribution sont pris de la folie du drive. Tous se lancent dans l’aventure : Système U eu dispose déjà de plus de 400 points de retrait au volant, Leclerc en a 144 et prévoit d’atteindre les 400 d’ici 2015, Casino envisage d’en équiper la totalité de ses 115 hypermarchés et Carrefour projette de se doter de 156 points de retrait courant 2012. Michèle Heitz, Jean-Pierre Douard et Gérard Cliquet qui se sont penché sur le sujet commentent : « ce phénomène va en s’accélérant du fait du faible coût d’ouverture d’un drive et de l’absence de demande d’autorisation »(1).
Début 2012, c’est Auchan qui annonçait sa volonté d’ouvrir une cinquantaine de nouveaux magasins drive avant 2014 identifiés comme des « relais de croissance » pour le groupe. Auchan a notamment précisé que ces nouvelles enseignes devraient permettre de compenser les destructions d’emploi du aux « gains de productivité » sur l’ensemble de ses magasins ». Le groupe estime ainsi que 32 000 postes devraient être créés contre 16 000 supprimés, soit une création de 16 000 emplois nette.

Pour les distributeurs, les avantages du drive sont nombreux ; c’est ce que met en avant la 16ème étude Référenseigne du Kantar Worldpanel. Tout d’abord, le drive correspond dans son principe aux attentes de 60% des ménages français qui disent chercher à « minimiser le temps passé à faire leurs courses ». En outre, c’est 80% des sondés de Kantar Worldpanel qui déclarent ne pas considérer les courses « comme un moment plaisant ». Ainsi en 2011, 1,9 millions de français ont fait leur course sur internet avant d’aller les retirer en magasin; un chiffre en augmentation depuis 2010. Le drive apparaît sans équivoque comme un service appelé à se développer.
D’après Kantar Worldpanel, la formule contribue d’ailleurs « à plus de 30% à la croissance d’E. Leclerc » et à hauteur de 76% de la croissance d’Auchan qui sont par ailleurs « les deux enseignes qui gagne de la PDM [(part de marché)] en 2011 ». Proposer un service de commande en ligne et de retrait au volant gratuit est ainsi identifié par le cabinet d’étude de marché comme le facteur clé pour capter la demande des « jeunes familles urbaines et pressées » perçue comme le débouché principal de l’offre de drive.

Michèle Heitz, Jean-Pierre Douard et Gérard Cliquet abondent également dans ce sens et expliquent que le drive est un outil « d’attraction de flux de clientèle » composé de ménage de plus en plus mobiles ». D’après eux en effet, la conjugaison d’un marketing procédant par segmentation géographique ainsi que les possibilités offertes par l’e-commerce conduisent les distributeurs à « prendre en compte davantage les flux de consommateurs extérieurs à leur zone de chalandise ». Ainsi d’après les auteurs, on peut envisager le comportement des consommateurs en considérant une « zone élémentaire » d’achat – soit l’endroit où ils résident – ainsi les zones extérieures où ils se rendent pour consommer. L’étude des flux et des échanges entre ces différentes zones d’achat mettent en lumière des comportements d’achat qui dépassent la seule enceinte de l’hypermarché et s’applique donc particulièrement à l’achat en ligne couplé au drive.
En étudiant le comportement de la clientèle d’une drive implanté dans les Yvelines selon cette méthode, les trois auteurs ont ainsi pu découvrir que « les résidents de zones limitrophes ou éloignées de la zone d’implantation utilisent proportionnellement plus le drive que les résidents de la zone d’implantation du drive qui, eux, utilisent l’hypermarché de référence ». Par ailleurs, divers facteurs explicatifs ont pu être référencés comme, notamment, la localisation du lieu de travail du consommateur qui dans « 80% des cas […] se situe dans une commune de la zone d’implantation du drive ». Les utilisateurs du drive sont pour l’essentiel « des personnes actives ayant un emploi, majoritairement âgées de moins de 42 ans et ayant un certain niveau de formation », « les couples avec enfants constituent une part dominante de la clientèle ».
Ces résultats sont tout à fait cohérents avec les insights mis en lumière par Kantar Worlpanel dans son étude Référenseigne. On y reconnaît en effet le profil dressé par Michèle Heitz, Jean-Pierre Douard et Gérard Cliquet celui des « jeunes familles urbaines et pressées », actives et connectées pour qui la formule drive présente des atouts pratiques évidents. On imagine aisément en effet comment une offre de service drive peut s’intégrer aux mouvements pendulaires effectués quotidiennement par ces jeunes actifs. L’analyse qualitative des trois auteurs confirme d’ailleurs que le drive est utilisé en « remplacement de la fréquentation de l’enseigne », voire même pour certains consommateurs « sans fréquentation préalable de l’enseigne » par des personnes « souvent adeptes des technologies de l’information et de la communication  et [...] réticentes aux déambulations dans les grandes surfaces, assimilées à des pertes de temps.

L’engouement des figures de la grande distribution française pour le service au volant et remarquable dans l’historique de l’année 2011. Il semble aussi à bien des égards justifiés. Pratiquée par un cabinet spécialisé comme Kantar Worldpanel ou par des chercheurs universitaires, l’étude des consommateurs semble en effet mettre en exergue de nouveau mode de consommation que les hypermarchés auraient tort d’ignorer. La grande distribution était un des secteurs où la pénétration des technologies de l’information et de la communication avait été la moins visible pour le public. Au tournant de l’année 2012 toutefois, le web 2.0 semble avoir bel et bien commencé à investir les lieux



(1) CLIQUET, G., DOUARD, J.-P., HEITZ, M., Grande distribution alimentaire et « drive » : une solution à la mobilité des consommateurs ?, septembre 2011, 22 pp..





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