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Un fonds monétaire européen (FME) comme premier instrument d'une nouvelle gouvernance économique de l'Europe




Jeudi 20 Mai 2010


Par Bernard Marois;

L’actuelle crise grecque, avec ses prolongements vers le Portugal et l’Espagne a mis en lumière le manque d’anticipation de l’Europe en matière économique. En intervenant « à chaud », sous la pression incontournable des marchés, l’Union Européenne démontre clairement les implications lourdes d’une absence de cadre institutionnel susceptible de prévenir ce type de crise. Les bricolages réalisés ces dernières semaines pour sauver la Grèce illustre également la nécessité de mettre en place une gouvernance économique plus « globale ».



Un fonds monétaire européen (FME) comme premier instrument d'une nouvelle gouvernance économique de l'Europe
Je ne suis pas convaincu que le Fonds de Stabilisation de 500 milliards d’euros que les autorités européennes veulent mettre en œuvre (complété par les 250 milliards apportés par le FMI) soit efficace sur le moyen terme, dans la mesure où les sommes que les gouvernements européens se proposent d’apporter vont d’une façon ou d’une autre augmenter les dettes souveraines totales de l’Union Européenne. Les marchés financiers ne tarderont pas à s’en rendre compte ! Par contre, je propose la mise en place de deux instruments plus appropriés : un Fonds Monétaire Européen destiné à agir en période de crise et une Agence du Trésor Européenne, dont la vocation serait de coordonner les politiques budgétaires nationales.

De mon point de vue, la création d’un Fonds Monétaire Européen, sur le modèle du FMI (voir un précèdent éditorial), complèterait le dispositif actuel, qui comprend, d’une part la BCE, en charge de la politique monétaire européenne (et, quoi qu’on dise, plutôt bien inspirée) et, d’autre part, le tandem Eurogroupe/Ecofi, qui assure une supervision à moyen et à long terme (politique budgétaire, éventuelle harmonisation fiscale, etc.), sans parvenir à la même efficacité. Ce FME serait responsable de la stabilité économique de la zone euro et peut être même de toute l’Union Européenne, en intervenant auprès des pays en difficulté, par des financements « conditionnels », c’est à dire avec « contraintes de résultats macroéconomique », à partir d’un plan de redressement accepté par l’emprunteur.

Reste à prendre un certain nombre de décisions essentielles pour le fonctionnement de ce Fonds. D’abord quel périmètre adopter ? La zone euro uniquement, ou, toute l’Union (ce qui permettrait à des pays comme la Hongrie ou la Lettonie de bénéficier de ces dispositifs, au lieu d’avoir à faire appel au FMI). Ensuite, comment exercer le pouvoir de décision ? Droit de vote proportionnel à la puissance économique du pays adhérent ou un pays/une voix ? Décision majoritaire (à quel seuil ?) ou unanimité ? Enfin, comment lever les ressources (fonds propres et emprunts) nécessaires au montage des financements ? Quotes-parts versées par les Etats, abondement de la Commission Européenne, recours aux marchés financiers internationaux, etc. En plus d’une action décisive au moment d’une crise financière, le FME pourrait intervenir en amont, pour conseiller un Etat en difficulté, dans la mise en place de son plan de redressement, ainsi que le fait le FMI.

Il me semble que la création de ce Fonds Monétaire Européen aurait plusieurs avantages : il permettrait, d’une part, de se passer de l’aide du FMI (et donc d’éviter une certaine « humiliation » pour l’Europe), montrant ainsi qu’elle est assez forte pour résoudre ses propres problèmes. D‘autre part, sa présence rassurerait l’Allemagne, en évitant que ce pays se retrouve en première ligne en cas de crise dans les Etats « Club Med ». Et puis, cette nouvelle institution viendrait renforcer la cohérence de l’Union Européenne, d’un point de vue économique et permettre une convergence vers un « modèle » futur, probablement à mi-chemin entre le modèle allemand et le modèle français (mon prochain éditorial).

En parallèle, il faut réfléchir à la mise en place d’une « Agence du Trésor Européenne », qui pourrait émettre de la dette obligataire sur les marchés financiers, à la manière du Département du Trésor américain, qui place des « Treasury Bills » pour financer le déficit budgétaire des Etats-Unis.

Pour l’instant, seul la BEI (Banque Européenne d’Investissement) commercialise des titres obligataires « communautaires » libellés pour l’essentiel en euros ; ils sont destinés uniquement à financer les activités de prêt de la BEI (essentiellement des projets d’infrastructures transnationaux). Reste à savoir, comment cette Agence serait gérée et quelles relations elle entretiendrait avec, d’une part, les Agences du Trésor nationales, et d’autre part, avec le FME. De toute évidence, c’est un projet « lourd » à mettre en place et dont la dimension « politique » est forte.

Cependant, une telle Agence pourrait intervenir, aux cotés du FME pour aider un Etat en difficulté et la BCE pourrait mettre ces « eurobonds » en portefeuille, sous réserve d’un aménagement de ses règles de fonctionnement.

Les Cdb



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