Carnets du Business


           

Entretien avec Laurence Adda, Chasseur de têtes pour DBAO Group




Vendredi 27 Avril 2012


Co-fondatrice du cabinet DBAO group, Laurence Adda est une professionnelle de la Gestion de Ressources Humaines. Vingt années d’expérience en tant que chasseuse de têtes spécialisée dans l’approche directe de cadres et d’experts lui confèrent une connaissance affûtée du recrutement de managers dans le milieu de l’industrie et des services. Malgré la crise et une baisse de près de 20% de leur chiffre d’affaires sur la période 2007-2010, les cabinets d’approche directe connaissent à nouveau l’embellie depuis 2011. En compagnie de Laurence Adda, les Carnets du Business font donc un éclairage sur les nouvelles méthodes du chasseur de tête.



Les Carnets du Business : Quelles sont les spécificités du chasseur de tête par rapport au cabinet de recrutement classique ?

Laurence Adda : Les cabinets de recrutement travaillent uniquement par annonce  et cherchent à répondre à un besoin de recrutement défini par le client. Le cabinet de chasse de tête part également du besoin du client mais il a pour spécificité de travailler en approche directe. Il élabore donc une stratégie de recherche de candidat(e)s potentiels adéquate compte tenu pour le poste à pourvoir et utilise par exemple les annuaires d’écoles ou les informations présentes sur les réseaux sociaux dresser des profil. Déterminer au préalable l’intérêt d’un candidat est à cet égard un objectif de premier plan dans le cadre d’une chasse.

Les CdB : Quelle place occupe l’éthique dans l’esprit du consultant privilégiant l’approche directe ?

Entretien avec Laurence Adda, Chasseur de têtes pour DBAO Group
L.A. : Le code déontologique du chasseur de tête procède tout d’abord d’un emploi justifié de l’approche directe. Avant d’y recourir, nous nous assurons toujours que cela est nécessaire. Si le poste est généraliste et que le recrutement peut procéder par annonce et par simple recrutement, l’approche directe n’est pas indiquée. Si le profil recherché est rare, si le poste proposé est effectivement très pointu, on peut partir en chasse. Ce premier principe est important car un chasseur de tête démarche des professionnels qui sont déjà en poste. Il ne peut donc pas se permettre de faire une offre à un candidat sans s’assurer au préalable qu’elle suscitera un intérêt réel et fort chez ce dernier notamment en termes d’évolution de carrière. Dans un second temps, la transparence entre le cabinet de chasse et son client est indispensable. Il est nécessaire d’aborder dans le détail la composition de la mission, des enjeux du poste à pourvoir, de sa place dans les projets de l’entreprise. Les attentes de celle-ci doivent être claires de telle façon que l’on puisse identifier un candidat idoine sur la base de critère précis. Ni l’entreprise, ni le recruté ne doivent être surpris une fois la chasse terminée.

Les CdB : Quels sont les atouts et les partenaires privilégiés d’un chasseur de tête ?

L.A. : Les premiers partenaires du chasseur de têtes sont ses clients. Ils sont prépondérants notamment pour les raisons déontologiques exposées plus tôt mais aussi pour des raisons pratiques. Travailler en étroite collaboration avec son commanditaire permet en effet de comprendre l’environnement dans lequel il évolue et de définir une stratégie de recherche adaptée. Le chasseur de tête a également intérêt à avoir des liens avec des secteurs autres que celui de ses clients. Cela peut en effet lui permettre de dresser des ponts entre ces secteurs qui peuvent partager le même réseau de distribution ou des typologies de clients par exemple. Ainsi le chasseur de tête peut être capable de proposer à l’occasion d’un recrutement, des candidat(e)s qualifié(e)s mais doté(e)s d’un trait distinctif qui peut faire la différence sur le long terme. C’est d’ailleurs là que se trouve le principal atout de la chasse de tête : elle permet de réaliser à l’employeur de pourvoir un poste en respectant des critères précis tout en dépassant le cadre exclusif d’un recrutement sectoriel. Enfin, le second atout du chasseur de tête réside dans sa capacité à former le client en lui donnant un retour sur les conditions de son marché de l’emploi. Cela lui permet d’en actualiser sa représentation tout en affinant son offre à destination des candidat(e)s.

Les CdB : Quels sont les secteurs d’activité qui recourent le plus à la chasse de tête pour leur recrutement ?

L.A. : Il n’y a pas de règle. Mais DBAO travaille par exemple beaucoup pour le secteur du luxe. Il s’agit d’une industrie qui, après deux années difficiles, recrute à nouveau. Nous travaillons également pour le secteur aéronautique. Da manière générale, les grands groupes sont les entreprises qui externalisent le plus leurs recrutements mais il est intéressant de souligner que les PME constituent une clientèle nouvelle pour nous. Alors qu’elles fonctionnaient beaucoup par cooptation jusqu’à présent, il semble qu’elles soient aujourd’hui en recherche de qualité, d’exhaustivité et d’impartialité dans leurs démarches de recrutement. Se tromper coûte cher en matière de Ressources Humaines et les prix de nombreux cabinets de chasses de tête étant désormais accessibles, leur sollicitation par les PME est devenue fréquente.

Les CdB : Depuis 2008 et jusqu’en 2015, l’APEC prévoit une augmentation des besoins en cadre des entreprises. Ressentez-vous cette tendance dans votre activité ?

L.A. : La demande en cadre dépend réellement du secteur d’activité considéré. Nous remarquons une demande supplémentaire émanant de la part du secteur du luxe et de l’aéronautique par exemple, mais il peut en aller différemment pour d’autres secteurs. Ces chiffres sont des moyennes, et ils recouvrent une grande diversité de situation dans le temps également. Ainsi, l’année 2011 a été exceptionnelle en matière de recrutement. Elle succède à deux années très difficiles. L’année 2012 a assez bien démarré mais l’activité a fortement ralenti sur les mois de mars et avril, vraisemblablement à cause de la période d’élection. Globalement, nous avons aujourd’hui assez peu de visibilité pour juger de l’activité du marché et cela exige des capacités de réaction accrue. Il y a encore quelques années en revanche, les périodes de recrutement étaient bien identifiées et nous savions anticiper leurs venues. Actuellement, il n’y a plus vraiment de règle ; on constate parfois des pics d’activité en juillet alors qu’il s’agissait d’une période creuse il n’y a encore pas si longtemps.

Les CdB : Avez-vous des conseils à donner aux recrutés et aux recruteurs ?

L.A. : À l’attention des recruteurs, je conseillerais de rester ouverts aux profils originaux lorsqu’ils définissent leurs besoins. Il est intéressant pour les entreprises de varier la composition de leurs équipes car cela leur apporte une ouverture. Cela passe parfois par une adaptation opérationnelle plus longue au début, mais c’est à terme un facteur clé de différentiation et d’innovation. Il me semble que les fonctions RH dans les entreprises françaises sont de plus en plus favorables à ce type de démarche et c’est à mon sens très positif. Par ailleurs, je suggère aussi aux recruteurs de choisir un cabinet de chasse de tête qui soit à la fois en phase avec l’image et la culture de leur entreprise et capable de la relayer. Indépendamment de leurs compétences, deux cabinets peuvent avoir des méthodes différentes et donc une faculté plus ou moins bonne à porter, auprès des candidat(e)s, le message de recrutement d’une entreprise telle qu’elle le souhaiterait.
Je pense enfin que les recrutés ont intérêt à faire un rapport d’étonnement personnel une fois en poste. J’ai constaté qu’ils s’intégraient mieux à leurs nouvelles fonctions lorsqu’il prenait le temps de penser aux nouveautés qu’ils rencontrent à leur arrivée dans leur nouvel environnement de travail. Cela contribue aussi à leur faire prendre conscience des enjeux spécifiques auxquels ils doivent répondre dans le cadre de leur nouveau poste. Les recrutés sont sollicités pour leurs capacités à apporter quelque chose de spécial à l’entreprise mais leur effort d’adaptation demeure indispensable. Il est en effet rare qu’ils puissent se contenter de travailler comme il le faisait dans leur précédente entreprise.





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