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Flavien Kulawik, KLB Group: "Les dirigeants doivent muscler la capacité d'implémentation de leur organisation"




Jeudi 15 Septembre 2016


Oscar Wilde écrivit un jour qu’il faut « toujours viser la lune, car même en cas d’échec, on atterrit dans les étoiles ». Quel dirigeant ne s’est jamais heurté, en effet, aux problèmes d’exécution stratégique de ses plans ? Il est toujours terriblement frustrant, lorsque le plan est presque parfait et les ressources mobilisables, allouées, de voir échouer un projet faute de savoir-faire. Car exécuter un plan est un métier complexe, qui exige perspicacité, pragmatisme et proactivité. Recourir à l’alchimie de l’implémentation, dès lors, c’est donc faire en sorte d’éviter que lorsque « le sage désigne la lune, l’idiot regarde le doigt ». Flavien Kulawik, PDG et co-fondateur de KLB Group, nous explique en quoi l’intelligence est la courroie de transmission des projets.



Vous avez fait de l’implémentation votre cœur de métier. Que signifie « implémenter », pour KLB Group ? Peut-on vous présenter comme des garants de « l’exécution stratégique » ?

Flavien Kulawik, PDG de KLB Group
Flavien Kulawik, PDG de KLB Group
Implémenter c’est réaliser son projet, son idée ou son objectif, totalement et intelligemment. Je précise « totalement » parce qu’on perd souvent une part significative du potentiel de valeur en cours de route, ou alors on échoue en calant dans les derniers mètres... On peut donc nous présenter comme les garants de l’exécution stratégique, même si l’implémentation revêt une dimension plus large que la seule exécution : en effet, implémenter requiert une posture idoine faite de perspicacité, d’agilité, de persévérance et de créativité.

L’intelligence dans l’implémentation fait la différence, car la mise en œuvre d’un projet ne se déroule jamais conformément au plan. Le diable est dans les détails. Il y a toujours des choses qu’on n’avait pas vues ou prévues.  Pour un dirigeant, transformer une idée en stratégie représente 10% du chemin à parcourir. Les 90% restants consistent à transformer la stratégie en réalisations concrètes. Implémenter, c’est donc donner au dirigeant la garantie que le plan sera exécuté en dépit de l’imprévu, grâce à l’intelligence que l’on injecte dans l’exécution.

Concrètement, quel est votre périmètre fonctionnel ?

Nous intervenons sur des projets d’amélioration de performance opérationnelle, de génération de cash, de changement de pratiques dans des environnements complexes comme les réseaux, ou encore de transition organisationnelle des centres de services partagés. D’autres projets très opérationnels dépendent du secteur ou du département de l’entreprise qui nous mandate. Citons le lancement d’une ligne de production, la construction d’une infrastructure, la sécurisation de capacité fournisseurs, la sécurisation opérationnelle d’un carve-out, ou l’achat d’un système d’information par exemple. 

Quelles sont les modalités d’intervention des professionnels de l’implémentation chez leurs clients ?

Nous commençons souvent par un projet spécifique, pour lequel nous bâtissons la solution optimale pour en garantir l’implémentation. Pour cela, nous associant trois dimensions métier complémentaires :  le conseil, pour s’assurer qu’on fasse les bonnes choses ; le management pour bien les faire ; et l’exécution, pour les faire jusqu’au bout. Après un premier projet, il n’est pas rare que nos clients sollicitent un accompagnement permanent à travers des partenariats d’implémentation, à la faveur d’un cadre contractuel hyper-flexible. Notre client fonctionne ainsi en mode « entreprise étendue » et nous devenons, dès lors, la force dédiée à l’implémentation de l’ensemble de ses projets. 

Jusqu’où intervenez-vous dans les processus décisionnels, lors de vos interventions ? Êtes-vous associés, par exemple, aux décisions relatives à l’alignement des moyens sur la stratégie ?

Bien sûr. Dès lors que nous garantissons l’implémentation, nous devons échanger régulièrement avec notre client pour nous assurer que les moyens sont en phase avec les enjeux. En particulier, nous pouvons anticiper les problèmes de ressources et y pallier le cas échéant car, à la différence d’un cabinet de conseil en management, nous disposons de profils opérationnels qui peuvent venir compléter ou remplacer les ressources du client qui sont manquantes ou redéployées en cours de projet, notamment dans la phase d’implémentation.

En outre, vous intervenez dans des secteurs très différents, et souvent marqués par de fortes spécificités techniques, économiques ou réglementaires par exemple. Des compétences sectorielles sont-elles nécessaires, en plus de l’approche métier, pour réussir une implémentation ?

Notre savoir-faire est justement de savoir assembler la dream team qui complète les équipes du client tout au long du projet, de manière très souple et évolutive : nous sommes en effet capables d’adapter en permanence les types de profils ainsi que le nombre de personnes requis. Nous conjuguons de la sorte des compétences métier (ingénierie, achat, finance, etc.), sectorielles (automobile, banque, etc.) et fonctionnelles (expertises spécifiques par types de projet ou d’organisation).

Quels sont les avantages du recours à l’implémentation pour une organisation, par rapport à l’outsourcing par exemple ?

Nous développons avec nos clients des partenariats d’implémentation qui sont des approches hybrides entre le conseil et l’outsourcing. Le modèle d’entreprise étendue suppose en effet que nous intégrions nos équipes à celles du client, et en les adaptant en permanence en fonction des besoins.

Quand vous externalisez un périmètre, vous adressez des processus le plus souvent répétitifs, que vous confiez à un prestataire qui les opère avec la maîtrise du personnel, des processus, et des systèmes d’information. Vous transférez souvent votre personnel, en échange d’une garantie de volumes sur plusieurs années, ce qui limite d’ailleurs votre intérêt en termes de flexibilité. Et surtout vous perdez la maîtrise des savoir-faire et vous vous interrogez à juste titre sur les conséquences de l’activation de votre clause de réversibilité.

Avec un partenariat d’implémentation, vous conservez une maîtrise et une flexibilité totales. Vous pouvez d’ailleurs sous-traiter des projets, et pas seulement des processus répétitifs. Vous avez les bénéfices d’une approche conseil, mais avec la garantie d’implémentation en plus, grâce aux ressources opérationnelles et au savoir-faire d’exécution du prestataire.

Certains dirigeants, comme Carlos Tavares encore récemment, recourent volontiers au concept « d’excellence opérationnelle ». Peut-on en déduire qu’un nouveau paradigme managérial est en train d’éclore, dans les grandes entreprises occidentales ?

Carlos Tavares est un manager hors pair qui a déjà fait progresser PSA en mettant en place l’excellence opérationnelle, avec son premier plan « Back in the race ». Bien sûr les bons résultats de PSA reposent aussi sur la pertinence des choix stratégiques en termes de dimensionnement et de positionnement des investissements, ainsi que sur la reprise du marché automobile. Mais l’impact managérial de Carlos Tavares a déjà été immense. La culture de performance, d’objectifs réalistes, dépassables et d’ailleurs dépassés, et la culture de la qualité d’exécution, sont en train de changer chez PSA. Avec son nouveau plan « Push To Pass », Carlos Tavares a choisi une analogie éloquente et réaffirme ainsi vouloir accroître encore l’efficience des ressources du groupe. « Push-to-pass » fait en effet référence au bouton installé sur le volant des pilotes américains, permettant de délivrer une réserve de puissance additionnelle le temps d’un dépassement.   

Or, dans l’implémentation, c’est un peu pareil. Vous ne pouvez pas être à fond tout le temps. Mais il y a des moments clés dans lesquels il faut appuyer sur le bouton. Alors oui, un nouveau paradigme managérial est en train d’éclore. Les dirigeants réalisent que la bonne stratégie ne produira pas les résultats escomptés sans muscler la capacité d’implémentation de leur organisation. 

A rebours des grandes tendances du management de projets, un bon « implémenteur » selon vous doit savoir « naviguer à vue ». Cela nous amène à la question des RH : sur quels critères vos consultants sont-ils recrutés ?

Nous distinguons 4 groupes de compétences que nous évaluons et que nous développons. Nous dénommons le premier « Strong Mind », car il recouvre la force mentale, la motivation, la capacité à faire face à l’adversité et à se motiver. Le deuxième groupe de compétences est « l’Action », qui englobe la capacité à performer dans l’action, dans la réalisation concrète, sur le terrain, avec une approche pragmatique, en faisant du mieux qu’on peut avec les moyens qu’on a. Le troisième est « Relational » qui recouvre l’empathie, la persuasion, l’écoute. Et le quatrième est « Thinking » qui recouvre les capacités de synthèse, d’analyse, la rigueur intellectuelle, et la créativité. Notre modèle SMART (Strong Mind Action Relational Thinking) adresse donc 4 formes d’intelligence très distinctes. Les recruteurs évaluent souvent les deux dernières, avec les quotients intellectuels et émotionnels par exemple. Nous sommes plutôt focalisés sur les deux premiers, qui font la différence dans la performance d’implémentation.

Avec plus de 600 collaborateurs à travers le monde, KLB Group est devenu une véritable « ETI du conseil » en moins de vingt ans. Avec le recul, quelle a été la clé de votre développement ?

Le maintien d’une culture entrepreneuriale, et de valeurs d’entreprise fortes : performance, responsabilité, pragmatisme, et éthique. Le maintien de la culture passe par l’exemplarité, la transmission des valeurs par le management, et un recrutement en ligne avec ces valeurs et la culture. Nous sommes très attentifs à la responsabilisation de nos collaborateurs, et nous reconnaissons l’échec comme nécessaire pour continuer à innover, à prendre des risques, et à créer des intrapreneurs. Cette culture nous a permis de développer au sein de KLB Group des business models très distincts, dont l’intégration offre une proposition de valeur unique pour nos clients par la flexibilité qu’elle leur apporte. En fonction de leurs problématiques et de leur environnement, nous mixons du conseil en management, du conseil rémunéré au succès, de la régie et du centre de service pour apporter la solution optimale.

Capucine Davignon




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