Arrêts maladie et congés payés : les patrons s’inquiètent



Vendredi 12 Septembre 2025


Par un arrêt rendu le 10 septembre 2025, la Cour de cassation a modifié en profondeur la réglementation applicable aux congés payés. Désormais, un salarié en arrêt maladie pendant ses vacances pourra récupérer ultérieurement ses jours de congé non pris. Cette décision vise à aligner le droit français sur le droit européen qui avait donné ce droit en 2012 et auquel la loi française ne se conformait pas encore.



Congés payés et arrêts maladie : ce que change la décision de la Cour de cassation

Jusqu’ici, la jurisprudence française considérait que l’employeur avait rempli son obligation dès lors que les congés étaient accordés, même si le salarié tombait malade. Cette position, adoptée depuis un arrêt de 1996, a été renversée. Désormais, « le salarié qui tombe malade pendant ses congés payés a notifié à son employeur cet arrêt, il a le droit de les voir reportés », relaye Service Public.

La décision découle directement de la directive européenne 2003/88/CE et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. L’idée centrale est que le congé annuel payé représente un droit au repos effectif, qui ne peut être remplacé par une période d’arrêt maladie. Concrètement, les entreprises devront donc reprogrammer des congés non utilisés, ce qui introduit un changement majeur dans la gestion des absences.

Les inquiétudes exprimées par les organisations patronales

Les organisations patronales ont réagi immédiatement. Patrick Martin, président du Medef, évoque un « signal préoccupant pour notre compétitivité et la lutte contre les arrêts de travail abusifs » selon TF1. Selon lui, cette décision risque d’accroître la durée totale des absences indemnisées et de compliquer la maîtrise des coûts de main-d’œuvre.

La CPME est encore plus ferme. Elle a qualifié cette évolution d’« ubuesque », souligne BFMTV, en expliquant le risque d’injustice entre salariés présents et absents. Pour les petites et moyennes entreprises, la possibilité de voir s’accumuler des jours reportés peut constituer une contrainte insurmontable. Certaines fédérations professionnelles craignent également que la rétroactivité des demandes ouvre la voie à des réclamations massives et imprévisibles, ce qui fragiliserait la trésorerie des entreprises.

Les implications pratiques pour les entreprises

Cette décision aura des effets tangibles sur la gestion quotidienne des ressources humaines. Les dirigeants et responsables RH devront anticiper plusieurs conséquences.

Un salarié qui tombe malade pendant ses congés peut désormais revenir avec un droit à des jours supplémentaires. Cela oblige les managers à revoir les plannings, parfois en urgence, pour concilier continuité de service et respect des droits individuels.

Le report des congés génère un coût direct : les jours supplémentaires devront être financés, soit en maintien de salaire, soit en indemnisation lors du départ du salarié. Pour une PME de 20 salariés, quelques cas par an peuvent représenter plusieurs milliers d’euros.

L’arrêt doit être notifié à l’employeur pendant les vacances. Cela implique de mettre en place des procédures claires pour recueillir les certificats médicaux, vérifier leur validité et enregistrer les jours à reporter. Les systèmes de gestion du temps (logiciels RH) devront être adaptés afin de distinguer les congés posés mais annulés pour cause de maladie. Sans traçabilité, le risque de litige prud’homal augmente.


 

François Lapierre