Droits de douane sur les produits laitiers : le conflit commercial entre la Chine et l’Europe s’intensifie



Mardi 23 Décembre 2025


Le 22 décembre 2025, la Chine a officialisé l’instauration de nouveaux droits de douane provisoires sur plusieurs produits laitiers importés de l’Union européenne. Annoncée par le ministère chinois du Commerce et appliquée dès le 23 décembre 2025, cette mesure renforce les tensions commerciales entre Chine et Union européenne, dans un contexte déjà marqué par des désaccords profonds sur la fiscalité, les subventions industrielles et l’équilibre des échanges.



Les droits de douane sur les produits laitiers, un nouvel épisode du conflit commercial

La décision chinoise vise officiellement à corriger un déséquilibre concurrentiel. Selon Pékin, certains produits laitiers européens bénéficieraient de subventions incompatibles avec les règles du commerce international, justifiant ainsi l’application de droits de douane allant de 21,9 % à 42,7 %. Ces taxes concernent notamment le lait, les fromages et les crèmes, des produits à forte valeur ajoutée pour les exportateurs européens.

Depuis plusieurs mois, la Chine et l’Europe s’opposent sur d’autres dossiers sensibles, notamment les taxes européennes envisagées sur les véhicules électriques chinois. Dans ce contexte, les produits laitiers apparaissent comme une cible sectorielle permettant à Pékin d’exercer une pression commerciale mesurée mais significative, tout en respectant formellement les procédures de l’Organisation mondiale du commerce.

Les autorités européennes contestent fermement cette lecture. Bruxelles estime que les éléments avancés par la Chine reposent sur des preuves insuffisantes et que la nouvelle taxe constitue une entrave injustifiée aux échanges. 

Des échanges agricoles devenus un levier stratégique entre la Chine et l’Europe

Sur le plan économique, l’enjeu est loin d’être marginal. Les produits laitiers européens représentent plusieurs centaines de millions d’euros de ventes annuelles vers la Chine. En 2024, les exportations françaises de lait, crème et fromage vers ce marché ont atteint environ 370 millions d’euros, selon des données reprises par Challenges. Sur les neuf premiers mois de 2025, ces exportations s’élevaient encore à 245 millions d’euros, malgré un léger repli.

La Chine, premier importateur mondial de nombreux produits agricoles, dispose d’un pouvoir de marché considérable. En augmentant la fiscalité sur les produits laitiers européens, Pékin envoie un signal clair aux partenaires commerciaux : les échanges peuvent être rapidement affectés en cas de désaccord politique ou économique persistant.

Pour les entreprises européennes, la hausse des droits de douane modifie brutalement les conditions de vente. Certaines sociétés sont exposées à des taxes supérieures à 30 %, voire proches de 42,7 % pour des groupes européens spécifiques, selon les autorités chinoises. Cette situation remet en cause la compétitivité des produits européens face aux producteurs locaux chinois ou à d’autres pays exportateurs, dans un marché déjà très concurrentiel.

Une fiscalité douanière au cœur des rapports de force internationaux

La multiplication des droits de douane entre la Chine et l’Europe révèle une évolution plus large du commerce international. Les instruments tarifaires, longtemps cantonnés à des ajustements techniques, deviennent des outils politiques à part entière. Dans ce cadre, la fiscalité douanière sert autant à protéger des secteurs nationaux qu’à peser dans des négociations globales.

Les produits laitiers illustrent cette logique. Pour Pékin, l’enquête antisubventions permet de justifier juridiquement la taxe. Pour Bruxelles, la mesure s’apparente à une riposte indirecte aux initiatives européennes dans d’autres secteurs stratégiques. Chaque camp affirme respecter les règles internationales, tout en utilisant au maximum les marges offertes par ces mêmes règles.


 

François Lapierre