L’industrie gazière européenne dans un cycle d’investissement désynchronisé
Entre 2022 et 2025, l’Europe a engagé une vague d’investissements sans précédent dans les terminaux de gaz, motivée par la nécessité de remplacer les flux russes interrompus. Dix-neuf sites ont été mis en service ou étendus depuis le début de cette réorganisation énergétique. Ce rythme, justifié à court terme, devient problématique à moyen terme : selon l’IEEFA, la consommation européenne de gaz pourrait baisser de 15 % entre 2025 et 2030, tandis que les importations de GNL reculeraient d’environ 20 % sur la même période.
Le ralentissement est déjà perceptible. La capacité de regazéification européenne, en hausse de 13 % en 2023 et de 8 % en 2024, ne progresserait plus que de 2 % en 2025. Malgré cette décélération, l’IEEFA estime que la capacité totale installée dépassera trois fois la demande effective de GNL d’ici 2030. En d’autres termes, une partie des terminaux pourrait devenir structurellement sous-utilisée, générant des coûts fixes sans retour industriel. « Les pays européens qui continuent à construire ou à agrandir des terminaux GNL risquent d’investir dans des infrastructures inutiles à mesure que la transition énergétique s’accélère », avertit Ana Maria Jaller-Makarewicz, analyste Europe à l’IEEFA.
Le ralentissement est déjà perceptible. La capacité de regazéification européenne, en hausse de 13 % en 2023 et de 8 % en 2024, ne progresserait plus que de 2 % en 2025. Malgré cette décélération, l’IEEFA estime que la capacité totale installée dépassera trois fois la demande effective de GNL d’ici 2030. En d’autres termes, une partie des terminaux pourrait devenir structurellement sous-utilisée, générant des coûts fixes sans retour industriel. « Les pays européens qui continuent à construire ou à agrandir des terminaux GNL risquent d’investir dans des infrastructures inutiles à mesure que la transition énergétique s’accélère », avertit Ana Maria Jaller-Makarewicz, analyste Europe à l’IEEFA.
Surcapacité, coûts fixes et risques économiques pour les opérateurs
Dans l’industrie du gaz, le modèle économique repose sur un équilibre délicat : des coûts d’investissement élevés, compensés par des volumes réguliers de regazéification. Or, la demande s’effrite, les marges diminuent et les taux d’utilisation chutent. Au premier semestre 2025, les terminaux européens n’ont tourné qu’à 52 % de leur capacité moyenne, selon les données de l’IEEFA. Ce niveau est inférieur au seuil de rentabilité de nombreux opérateurs, souvent situé autour de 70 %.
Cette sous-activité fragilise la chaîne de valeur. Les exploitants doivent amortir des infrastructures évaluées à plusieurs milliards d’euros alors que les flux déclinent. En France, les terminaux de Dunkerque, Montoir et Fos accueillent des cargaisons en nombre réduit depuis le printemps 2024. Le terminal flottant du Havre, inauguré en 2023 pour renforcer la sécurité d’approvisionnement, a été jugé « faiblement utilisé » par la justice administrative : le 16 octobre 2025, le tribunal de Rouen a ordonné le retrait de l’unité FSRU « Cape Ann ». Au niveau européen, les capacités surabondantes induisent une concurrence accrue entre terminaux et une pression à la baisse sur les tarifs de regazéification. Les groupes énergétiques doivent alors réallouer des ressources financières vers la maintenance d’actifs sous-employés, au détriment de l’investissement dans les énergies bas-carbone.
Cette sous-activité fragilise la chaîne de valeur. Les exploitants doivent amortir des infrastructures évaluées à plusieurs milliards d’euros alors que les flux déclinent. En France, les terminaux de Dunkerque, Montoir et Fos accueillent des cargaisons en nombre réduit depuis le printemps 2024. Le terminal flottant du Havre, inauguré en 2023 pour renforcer la sécurité d’approvisionnement, a été jugé « faiblement utilisé » par la justice administrative : le 16 octobre 2025, le tribunal de Rouen a ordonné le retrait de l’unité FSRU « Cape Ann ». Au niveau européen, les capacités surabondantes induisent une concurrence accrue entre terminaux et une pression à la baisse sur les tarifs de regazéification. Les groupes énergétiques doivent alors réallouer des ressources financières vers la maintenance d’actifs sous-employés, au détriment de l’investissement dans les énergies bas-carbone.
France et Europe : entre sécurité énergétique et rationalité industrielle
La France occupe une position paradoxale dans le système européen du gaz. Son électricité bas-carbone la rend peu dépendante du gaz pour la production d’énergie, mais son réseau d’importation maritime en fait un acteur logistique majeur. Selon l’IEEFA, 41 % du GNL russe importé en Europe au premier semestre 2025 ont transité par ses terminaux. Cette fonction pivot permet de sécuriser l’approvisionnement de ses voisins, mais elle l’expose aussi directement au déclin structurel de la demande européenne et aux sanctions contre la Russie. Le 23 octobre 2025, l’Union européenne a adopté sa 19ᵉ série de sanctions contre Moscou. Le texte prévoit l’interdiction des contrats à court terme sur le GNL russe dès avril 2026, puis celle des contrats à long terme à partir de janvier 2027.
Sur le plan économique, cette surcapacité crée un problème d’allocation du capital. Chaque terminal représente plusieurs centaines de millions d’euros d’investissement initial, financés sur vingt à trente ans. Si les taux d’utilisation restent faibles, les coûts unitaires explosent et compromettent la rentabilité des opérateurs. Dans un contexte de transition énergétique, ces actifs risquent d’être déclassés avant leur amortissement complet.
Sur le plan économique, cette surcapacité crée un problème d’allocation du capital. Chaque terminal représente plusieurs centaines de millions d’euros d’investissement initial, financés sur vingt à trente ans. Si les taux d’utilisation restent faibles, les coûts unitaires explosent et compromettent la rentabilité des opérateurs. Dans un contexte de transition énergétique, ces actifs risquent d’être déclassés avant leur amortissement complet.