Une réponse politique à une préoccupation devenue majeure
Depuis plusieurs années, les institutions européennes alertent sur les risques liés à l’usage précoce des plateformes numériques. Le Parlement européen rappelle dans une publication que les réseaux sociaux exposent les jeunes à des contenus violents, addictifs ou trompeurs.
C’est dans ce contexte que les députés ont soutenu un seuil par défaut de 16 ans, applicable aux réseaux sociaux, aux plateformes de vidéos et aux compagnons IA, comme annoncé par le communiqué officiel du Parlement. Pour les moins de 13 ans, l’institution recommande une interdiction complète.
Le rapporteur du texte, l’eurodéputée danoise Christel Schaldemose, a défendu cette mesure dès octobre 2025, déclarant : « Nous devons relever le seuil d'accès aux réseaux sociaux, c’est pourquoi nous proposons un âge minimum de 16 ans à l’échelle de l’UE ».
Une résolution non contraignante, mais stratégique
Sur le plan juridique, cette résolution n’a aucune valeur contraignante, comme l’a rappelé Reuters en précisant qu’elle ne crée pas d’obligation immédiate pour les plateformes. Les entreprises du numérique peuvent donc, en théorie, maintenir leur seuil d’inscription actuel, souvent fixé à 13 ans.
Pour autant, son importance est stratégique. Dans le système institutionnel européen, une résolution sert de signal politique et oriente les travaux législatifs futurs. Le Parlement invite clairement la Commission à renforcer l’application du Digital Services Act, déjà mentionné dans ses communications officielles comme un outil clé pour protéger les mineurs.
L’initiative pourrait donc préfigurer une future directive, voire un règlement, fixant une majorité numérique européenne. Plusieurs États membres ont d’ailleurs engagé des réflexions similaires, comme le rapportait L’Express.
Une bataille portant sur la vérification d’âge
L'un des points les plus sensibles concerne la vérification d’âge. Le Parlement européen estime que les plateformes doivent se doter de mécanismes fiables, mais respectueux des données personnelles. Les députés s’opposent à l’idée d’un contrôle trop intrusif, comme le recours systématique à des documents d’identité, et privilégient des méthodes anonymisées, un positionnement cohérent avec les orientations déjà exprimées dans les rapports préparatoires du Parlement.
Sans solution technique robuste, les règles d’âge resteront difficiles à appliquer. Mais un système trop intrusif poserait un risque disproportionné pour la vie privée. Cette tension constitue l’un des principaux obstacles à l’émergence d’une régulation réellement efficace.
Pression sur les plateformes, attentes des parents et débat sociétal
La résolution européenne intervient dans un climat où les parents et associations demandent une protection accrue contre les pratiques jugées dangereuses. Le Parlement européen dénonce notamment les « conceptions addictives » et les mécanismes proches du jeu de hasard utilisés par certaines plateformes, rappelés dans son communiqué officiel.
Ces fonctionnalités — défilement infini, notifications permanentes, systèmes de récompenses — sont explicitement citées par les députés comme des éléments contribuant à l’addiction des jeunes. L’objectif est de pousser les entreprises du numérique à revoir la conception même de leurs produits.
Les plateformes, déjà soumises au DSA, pourraient donc devoir modifier en profondeur leurs modèles, notamment si la Commission suit les recommandations du Parlement. Reuters mentionne que cette pression politique accrue vise à accélérer la création d'un cadre plus strict.
Une étape vers une future harmonisation européenne ?
Même sans force obligatoire, la résolution constitue un jalon important : elle fixe une ligne politique européenne, harmonise les positions et prépare le terrain à une législation future. Plusieurs eurodéputés espèrent que cette résolution permettra de bâtir une majorité numérique européenne.
Certains États membres y sont favorables, d’autres plus prudents. Les résistances portent notamment sur la liberté d’expression, l’accès à l'information ou la charge administrative pour les petites plateformes. Mais une tendance se confirme : l’Union européenne veut désormais jouer un rôle central dans la protection numérique des mineurs.
Ce mouvement s’inscrit dans un virage plus large de la régulation technologique européenne. La bataille autour de l’âge d’accès aux réseaux sociaux ne fait que commencer, mais la position du Parlement dessine les contours d’un futur cadre commun.