Les assurances e-réputation , un marché prématuré ?



Mercredi 6 Juin 2012


L'e-réputation est un enjeu toujours plus important pour les entreprises en tant qu’organisation, mais aussi pour les individus qui la composent. Moulin brassant inlassablement de l’information, internet tire sa force du fait que chacun puisse y rentrer et y sortir à son gré. C’est aussi la raison pour laquelle il est facile d’y constater des abus fréquents portant notamment atteinte aux individus. Des assurances proposent aujourd'hui aux particuliers de se prémunir contre les préjudices réputationnels liés au web.



En 2011, Swiss Life lançait le premier contrat d’assurance destinée à protéger l'e-réputation. Au mois de juin 2012, c’est au tour de la compagnie Axa de se faire remarquer en diffusant un spot publicitaire pour faire la promotion de son offre intitulée « protection familiale intégr@le » destinée à protéger les assurés contre les dommages occasionnés par les données malveillantes publiées à leur encontre sur internet.
 
La diffamation et l’usurpation d’identité sont des exemples de risques indéniables liés à l’existence du web. En conséquence, Axa a choisi de positionner son offre de garantie de couverture de dommages réputationnels sur internet de la même façon qu’elle le fait pour les dommages courants. Aux compensations financières versées en cas de dommage s’ajoute ainsi une assistance juridique ainsi qu’une couverture destinée à financer une prestation de suppression du contenu litigieux en ligne d’un prestataire spécialisé.
 
Aussi innovante qu’elle puisse paraître, cette offre d’assurance n’en reste pas moins très limitée en terme de couverture des dommages. Qu’il s’agisse d’Axa ou de Swiss Life, ces prestations s’appliquent à des diffusions d’informations malveillantes et nuisibles à la réputation comprise dans un cadre privé. Ces offres excluent donc les atteintes réputationnelles subies par un individu en sa qualité de professionnel.
 
L’assurance proposée par Axa s’adresse certes à un marché composé de parents souhaitant protéger leurs enfants et n’a de toute façon pas vocation à couvrir tous les risques. Mais l’étendue des dommages qu’elle exclue de sa couverture soulève véritablement la question de la possibilité même de se prémunir contre les atteintes à l'e-réputation. L’offre d’Axa donne par exemple droit à 10 000 euros par an et par litige pour financer la suppression de contenu dommageable sur internet. Mais est-il seulement possible d’empêcher la circulation d’une photo compromettante une fois qu’elle a été diffusée sur la toile ?
 
À bien des égards, les assurances e-réputation apparaissent comme des produits répondants à une demande certes réelle, mais selon des modalités très insuffisamment fonctionnelles. Le marché des assurances e-réputation existe indéniablement, mais son offre manque cruellement de maturité. Pour les particuliers, et notamment ceux qui exercent des professions exposées, le seul filet de sauvetage susceptible de parer systématiquement une atteinte à l'e-réputation sans occasionner de dépenses supplémentaires semble donc rester le dépôt de plainte.

Arthur Fournier