Lancement officiel ce 25 juin 2025 : les soldes d’été débutent sur l’ensemble du territoire français (hors Corse), et s’étendront jusqu’au 22 juillet. Cette opération commerciale réglementée, longtemps perçue comme stratégique pour les enseignes, semble désormais entrer dans une phase de remise en question. Plusieurs signaux convergent : recul du panier moyen, pression de la concurrence numérique, et participation devenue contrainte pour de nombreux détaillants.
Un dispositif encadré mais de plus en plus contesté
Les soldes restent un format strictement défini par la réglementation française. Selon la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), seuls les articles proposés à la vente depuis au moins un mois peuvent faire l’objet de soldes. Les commerçants sont par ailleurs tenus d’afficher le prix le plus bas appliqué dans les trente jours précédents.
Historiquement instaurées pour faciliter l’écoulement des stocks saisonniers, les soldes représentaient un levier important de régulation commerciale. Toutefois, dans un contexte de désintermédiation croissante, de digitalisation du commerce et de multiplication des opérations promotionnelles tout au long de l’année, leur efficacité s’émousse.
Une fréquentation en stagnation, des paniers en recul
D’après une enquête réalisée par OpinionWay pour le compte de la fintech Mollie, publiée le 18 juin 2025, 40 % des Français déclarent vouloir participer aux soldes d’été, un taux stable par rapport à 2024 . Mais c’est le montant moyen des dépenses prévues qui attire l’attention : 233 euros, contre 307 euros l’an dernier. Cette baisse de près de 25 % illustre une dynamique d’optimisation budgétaire des ménages, dans un contexte d’inflation encore contenue mais persistante.
L’étude met aussi en évidence l’évolution des pratiques d’achat. Le modèle multicanal progresse nettement : 35 % des sondés envisagent un parcours hybride magasin/internet, tandis que 44 % privilégient les points de vente physiques (contre 53 % en 2024), et 21 % optent pour un achat exclusivement en ligne. Ces données confirment une transformation structurelle de la consommation, qui affecte directement la performance des périodes de soldes.
Une participation motivée par la pression du marché
Si les commerçants restent nombreux à s’inscrire dans le calendrier des soldes, ce n’est plus tant pour stimuler leur chiffre d’affaires que pour préserver leur compétitivité face aux autres acteurs. Plusieurs enquêtes relayées par la presse économique en témoignent : 6 détaillants sur 10 déclarent ne plus trouver d’intérêt direct à cette opération, mais s’y résignent pour ne pas perdre de parts de marché.
Ce constat renvoie à une réalité sectorielle : dans l’habillement, par exemple, où les marges brutes sont structurellement faibles, les remises peuvent peser lourd sur les résultats nets. Or, la multiplication des promotions (ventes privées, Black Friday, offres flash) tout au long de l’année a largement réduit l’effet d’aubaine des soldes réglementés.
Dès lors, pour beaucoup d’indépendants, participer aux soldes relève davantage d’une stratégie défensive que d’un choix d’optimisation commerciale.
Une concurrence structurelle de plus en plus forte
Le secteur du commerce de détail doit également composer avec une montée en puissance continue des plateformes d’ultra fast fashion et de la seconde main. Sur le premier trimestre 2025, des acteurs comme Shein, Temu ou Amazon ont enregistré une part de marché supérieure à celle des grandes enseignes traditionnelles, selon les données consolidées par L’Opinion.
Ce glissement s’explique par des prix très agressifs, une logistique optimisée et une capacité à renouveler les stocks à un rythme difficilement soutenable pour les détaillants classiques. Dans ce contexte, les soldes apparaissent comme un levier de moins en moins différenciant, d’autant que certaines plateformes proposent des promotions permanentes sans contrainte légale.
Par ailleurs, les responsables de fédérations professionnelles, comme celui du prêt-à-porter interrogé par Fashion Network, soulignent une dégradation de la perception de la valeur produit. La stratégie de remises continues tend à banaliser l’acte d’achat et à affaiblir la position tarifaire des commerçants indépendants.
Un modèle promotionnel en mutation
Les données disponibles montrent clairement que les soldes, telles qu’elles sont actuellement encadrées, ne répondent plus pleinement aux attentes des commerçants. Leur rentabilité réelle devient incertaine, alors que leur caractère obligatoire reste très fort dans la logique concurrentielle.
Les enseignes les plus résilientes adoptent aujourd’hui une logique d’ajustement progressif, misant sur une gestion plus fine des stocks, des offres personnalisées hors soldes, et une présence accrue sur les canaux numériques. Mais pour les structures de plus petite taille, la transition reste difficile.
Dans ce contexte, une redéfinition du dispositif législatif autour des périodes de soldes pourrait être envisagée, à condition d’intégrer les nouvelles pratiques de consommation, l’évolution des modes de distribution, et les réalités économiques propres à chaque secteur.