Carnets du Business


           
Marie-France FOURRIER
Marie-France Fourrier, Executive Coach, Coerial Intelligence Collective (http://www.coerial.com/)... En savoir plus sur cet auteur

Entreprises : valorisez-vous davantage chez vos collaborateurs la compétence de « visibilité personnelle » ou de « création de valeur collective » ?




Jeudi 8 Novembre 2012


Depuis quelques années, nous constatons une véritable floraison de consulting, formations, et publications de toutes sortes centrés sur le développement de la « visibilité personnelle », du « personal branding », du « marketing de soi ».

D’un point de vue sociologique et individuel, on peut tout à fait comprendre l’intérêt de chacun à se rendre visible en dehors de sa sphère professionnelle ou familiale : il accroit ainsi ses chances d’être recruté, apprécié sur ses domaines de compétence ou sollicité sur des sujets qui l’intéressent. Cette visibilité externe peut lui permettre d'enrichir son quotidien, de s'ouvrir à de nouveaux projets, de rejoindre des communautés d'intérêt partagés, et de combler une insuffisance de reconnaissance ou de stimulation dans ses sphères habituelles.

D’un point de vue socio-organisationnel, cette tendance de fond peut néanmoins amener les entreprises à se questionner : quelles conséquences cette valorisation accrue de la compétence de « visibilité personnelle » a-t-elle sur le lien social interne et sur l’efficacité collective ?



Entreprises : valorisez-vous davantage chez vos collaborateurs  la compétence de « visibilité personnelle » ou de « création de valeur collective » ?
 

Nous savons qu’il ne suffit pas d’afficher de belles valeurs dans un rapport annuel pour créer un collectif de qualité. L’écart entre le discours et les actes ne trompe plus personne. Ce que les collaborateurs vont regarder et modéliser, c’est ce qui est effectivement pratiqué et valorisé par l’entreprise. A quoi leurs managers dédient-ils leur énergie : à faire avancer le projet commun de l’équipe ou de l’entreprise ou à renforcer leur « visibilité personnelle » ? Qu’est ce que l’entreprise valorise dans les faits : la création de valeur collective (comment la mesure-t-elle ?) ou l’art finement pratiqué de la mise en valeur de soi ?
 
Les choses ne sont pas si tranchées et l’un n’exclue pas l’autre, me direz vous. Certes.
Et pourtant …
 
Dans son dernier et riche ouvrage « Booster l’Intelligence Collective », Olivier d’Herbemont s’appuie sur les travaux de Kopp pour optimiser la mise en mouvement de l’intelligence collective dans une organisation. Dans un monde complexe et mouvant, le rôle du manager est de s’attacher à faciliter les processus d’auto-réorganisation les plus fructueux pour le collectif et d’organiser la controverse pour que les idées et les énergies se mélangent et s’alignent progressivement. Enfin, une fois la vision et les repères partagés, il adopte une « stratégie d’émulation qui s’attache à faire de l’idée commune une aventure collective dont les héros sont par nature les équipes de terrain de l’organisation, les actants ». Le manager, le chef de projet et les experts sont les « magiciens ressource », en appui des équipes qui, elles, sur le terrain, implémentent le changement dans le réel. Le manager n’abandonne en aucun cas l’accompagnement du processus, bien au contraire, il reste vigilant à fluidifier l’énergie, les débats, et permettre l’alignement de l’action. Mais, dans ce type de configuration, la valeur ajoutée du manager « facilitateur » est de rendre visible à tous les avancées du collectif et les apports de chacun … pas de travailler sa visibilité personnelle.
 
Cette démarche d’accompagnement du changement est extrêmement efficace, surtout en environnement organisationnel complexe et dans les secteurs où l’innovation et la réactivité sont clé. Les business case que décrit Oliivier d’Herbemont sont nombreux et éclairants.
 
Ceci étant, pour que cette fédération de valeur ajoutée collective soit pérenne, l’entreprise doit aligner l’ensemble de la chaine des signes de reconnaissance. Autrement elle doit être en capacité de valoriser ceux qui, dans l’ombre, facilitent le changement pour elle.
 
Une fois le projet de transformation mené à bien, si le manager « facilitateur » se voit « coiffé » par un tiers, qui aura, lui, en parallèle, consacré son énergie à travailler son « marketing interne », sa « visibilité personnelle » ses « réseaux d’influence » et sa « stratégie de périmètre » sans autre valeur ajoutée ou légitimité vis-à-vis du collectif, il y a fort à parier que le manager facilitateur vogue vers d’autres cieux. Il sera rapidement rejoint par les hommes clé qui l’ont aidé à fédérer l’intelligence collective. La reconnaissance et la visibilité des réalisations du terrain étant « capturées » par le nouveau manager, champion du marketing de soi, l’énergie des acteurs et du projet de transformation ou d’innovation s’étiolera.
Et l’innovation changera de camp.
 
Et là, hélas, les exemples sont tout aussi nombreux.






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