L’affaire Ménard : un cas devenu emblème
Les députés ont voté le lundi 16 juin 2025 en commission pour interdire le mariage avec un étranger en situation irrégulière. Soutenue par l’Union des droites pour la République (UDR), le parti dirigé par Éric Ciotti, cette proposition de loi sénatoriale, initiée par Stéphane Demilly (Union centriste), vise à « protéger les maires », selon les mots du député UDR Éric Michoux. Ces derniers, selon lui, seraient parfois « complices involontaires d’un tel détournement de la loi ».
Le texte prévoit qu’aucune union ne puisse être prononcée si l’un des conjoints réside de manière illégale en France. Un changement de taille dans le droit civil français, historiquement fondé sur le principe d’universalité du mariage. L'examen en séance publique est fixé au 26 juin 2025.
Le débat s’est intensifié depuis l’été 2023. À cette date, Robert Ménard, maire de Béziers, a refusé de célébrer un mariage entre une citoyenne française et un ressortissant algérien sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF). Ce refus lui vaut aujourd’hui une comparution devant le tribunal correctionnel de Montpellier. Il encourt jusqu’à cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende. Ce cas est devenu un point de cristallisation du débat sur le mariage et l’immigration.
Pour les partisans du texte, comme la députée Les Républicains Émilie Bonnivard, il est urgent de doter les maires d’un « levier juridique en cas de doute sérieux pour suspendre ou refuser une union frauduleuse ». À ce jour, aucun outil légal ne permettait à un édile de bloquer un mariage, même s’il suspectait une irrégularité sur le séjour.
La gauche contre cette proposition
La gauche, dans son ensemble, s’est fermement opposée au texte. Céline Thiébault-Martinez (Parti socialiste) y voit « une nouvelle dérive de la droite et de l'extrême droite ». Pour l’écologiste Léa Balage El Mariky, il s’agit d’un projet « xénophobe et liberticide ». Quant à Emmanuelle Hoffman (Ensemble pour la République), elle pointe un « problème majeur de constitutionnalité » et prédit une « censure certaine » par le Conseil constitutionnel.
Ces critiques ne sont pas que symboliques. En droit français, le mariage est une liberté fondamentale reconnue par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Restreindre cette liberté sur la seule base du statut migratoire pourrait être jugé disproportionné.
Malgré la polémique, le gouvernement a soutenu la démarche. Le président Emmanuel Macron a évoqué un « débat de bon sens ». Les ministres Gérald Darmanin (Justice) et Bruno Retailleau (Intérieur) ont également salué l’initiative.