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Christophe Chaptal de Chanteloup
Christophe Chaptal de Chanteloup a fondé le cabinet en stratégie et organisation cc&a. Designer de... En savoir plus sur cet auteur

Marketing et décroissance




Mardi 14 Janvier 2014


La démarche marketing est-elle compatible avec le concept de la décroissance ?



Face au phénomène global de saturation — touchant marché, consommateur et producteur —, il pourrait être tentant d’apporter un certain crédit au concept de la décroissance, qui consiste, en quelque sorte, à maintenir les marchés dans une sorte d’état d’activité minimale, tout en prenant soin de répondre le mieux possible aux besoins essentiels du citoyen.

Mais qu’est-ce que la décroissance ? En peu de mots (qui n'engagent que l'auteur), elle se fonde sur des axiomes tels que :
  • la frugalité ;
  • la simplicité volontaire ;
  • moins travailler, mieux travailler ;
  • le refus de la consommation inutile ;
  • la conservation ou la stabilisation des ressources ;
  • etc.
 
Ces objectifs sont sans doute louables, voire même légitimes selon le point de vue adopté, mais disons qu’il s’agit surtout, pour l’instant, de remettre en cause un système de société basé sur le principe de la consommation, sans pour autant apporter une solution de remplacement applicable, ou du moins réaliste.

Si l'intention en soi n'est pas critiquable  — sauvegarde des ressources planétaires, refus du gaspillage, recentrage sur de "vraies" valeurs, notons, cependant, que le rouage de cette mécanique est de type "arrêt par défaut" : on s’ajuste à ce que l’on a, on ne conforme pas — dans l’acception positive du terme — un environnement à une ambition de développement liée à des objectifs parfaitement louables et défendables, ce qui pourrait se concevoir sans automatiquement piller les ressources disponibles et mettre à mal la planète.

Mais se contenter de ce qui est disponible n’est pas spécifiquement le mode de fonctionnement préféré de l’être humain, qui se caractérise davantage par un repoussage systématique des limites imposées — qu’elles soient naturelles, géographiques, scientifiques ou techniques — que par la soumission aux éléments. On voit mal, dans ces conditions, comment un état de quasi-immobilité pourrait satisfaire durablement notre espèce, à la nature intrinsèquement dynamique et évolutive.

Dès lors, comment peut-on vouloir imposer une stabilisation générale, puisqu’aucun système, public ou privé — de quelque nature qu’il puisse être — ne sait convenablement intégrer les données inhérentes à un tel état ? Ajoutons, concernant ce dernier point, que le principe organisationnel de l’entreprise sait encore moins que tout autre demeurer statique : même celle qui aurait pour ambition d’être la plus viscéralement humaniste et pro-développement durable n’aurait pas d’autres choix que de croître, ne serait-ce que pour renforcer sa notoriété et élargir sa base de clients citoyens.

La "force expansionniste" se chargera donc bien vite de trouver une autre issue que la décroissance, en partant du postulat :
  • qu’il vaut bien mieux une société en mouvement et en proie à la résolution de l’équation du renouvellement des ressources ;
  • plutôt qu’une société inerte, obnubilée par un retour hypothétique à des valeurs ancestrales supposées être restées à l’écart d’une quelconque croissance.
 
La décroissance, compte tenu de ce que nous venons de dire, ce serait demander à un Airbus A380 de couper ses moteurs alors qu’il se prépare à atterrir : c’est le crash quasiment assuré, même avec des pilotes d’une remarquable habileté...

Convenons alors avec le lecteur que le marketing n’a rien à voir avec la décroissance, et qu’il est parfaitement incapable de s’accorder à ce terme, même dans le but d’instituer une intéressante discipline qui s’intitulerait "marketing de décroissance".

Marketing et décroissance
Ce thème (et bien d'autres) est développé en détail dans l'ouvrage "Le marketing de rupture - De nouvelles pratiques pour les marchés en mutation", à paraître le 15 février 2014 aux éditions De Boeck.





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