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La nouvelle taxe sur les croisières : un choc pour le tourisme




Lundi 8 Décembre 2025


Avec l’instauration d’une taxe de 15 euros par passager et par escale, la France engage un outil fiscal inédit appliqué aux croisières internationales. Une mesure présentée comme écologique, mais dont les effets sur le tourisme, l’attractivité des ports et la chaîne de valeur du maritime interrogent aujourd’hui l’ensemble du secteur.



Une taxe pensée pour l’écologie, mais qui redessine les équilibres touristiques

Adoptée par le Sénat le 1ᵉʳ décembre 2025 dans le cadre du budget 2026, cette nouvelle taxe ambitionne de répondre aux impacts environnementaux des paquebots. Elle pourrait générer jusqu’à 75 millions d’euros par an, fléchés vers la protection des littoraux.

La logique du « pollueur-payeur » appliquée au tourisme maritime marque une évolution notable des politiques publiques françaises : faire contribuer les croisiéristes aux coûts environnementaux générés par leur séjour. Les arguments du Sénat s’appuient sur des données alarmantes : les paquebots européens émettraient chaque année plus de 7 millions de tonnes de CO₂, un niveau comparable à celui d’une flotte d’un milliard de voitures, selon Public Sénat.

Cependant, le tourisme représente plusieurs milliers d’emplois directs dans les ports français et des retombées économiques significatives pour les commerces, restaurateurs, transporteurs et guides locaux. Chaque escale génère des flux de consommation immédiats, particulièrement dans les zones littorales à forte saisonnalité. Dès lors, la taxe ne constitue pas seulement une mesure environnementale : elle s’inscrit dans une redéfinition plus large du modèle touristique côtier, dans lequel la performance économique doit désormais cohabiter avec la responsabilité écologique.

Pour les ports et destinations touristiques, un risque d’arbitrage défavorable

Le montant, 15 euros par passager et par escale, reste limité individuellement, mais son effet cumulé peut s’avérer déterminant du point de vue des armateurs. Sur un navire de 4 000 passagers effectuant deux escales françaises, la taxe représente déjà 120 000 € pour une seule rotation.

Dans un secteur où les marges d’exploitation sont finement calculées, cette hausse du coût d’escale pourrait modifier la stratégie des compagnies. Plusieurs acteurs du tourisme maritime, relayés par CLIA Europe, redoutent un « arbitrage défavorable » au profit de ports concurrents en Méditerranée, moins taxés et parfois plus flexibles. Pour les destinations françaises, le risque est réel : moindre nombre d’escales, réduction du temps de présence à quai, baisse des retombées économiques directes, notamment dans les régions dépendantes du tourisme de croisière (Provence, Côte d’Azur, Normandie, Bretagne).

Vers un tourisme maritime plus responsable : enjeu RSE majeur pour la filière

Bien que contestée par les professionnels, la taxe constitue un signal clair envoyé par les pouvoirs publics : l’ère des croisières « à externalités gratuites » touche à sa fin. Dans une logique RSE, le dispositif introduit une forme de redevabilité environnementale désormais impossible à contourner. Les recettes pourraient financer : des infrastructures portuaires moins polluantes, des projets de dépollution ou de restauration des écosystèmes littoraux, des aménagements touristiques plus soutenables, des dispositifs d’accueil mieux dimensionnés face au surtourisme.

Pour les destinations, cela représente une opportunité : améliorer leur empreinte écologique tout en renforçant leur attractivité auprès d’un public de plus en plus sensible aux critères environnementaux. Pour les compagnies, l’enjeu consiste désormais à intégrer cette taxe dans une stratégie RSE cohérente, où la réduction des émissions, la sobriété énergétique et l’amélioration des performances environnementales des navires deviendront des facteurs de différenciation.


 

François Lapierre

Dans cet article : croisière, décision, loisir, port, prix, rse, sénat, taxe, tourisme



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