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Au sommet d’Astana, Chine et Asie centrale renforcent leur coopération




Mercredi 18 Juin 2025


Du 16 au 18 juin 2025, la capitale kazakhe Astana a accueilli le deuxième sommet Chine–Asie centrale, rassemblant les chefs d’État du Kazakhstan, du Kirghizistan, du Tadjikistan, du Turkménistan, de l’Ouzbékistan et le président chinois Xi Jinping. Ce sommet s’inscrit dans le prolongement du format multilatéral inauguré à Xi’an en mai 2023, marquant une accélération diplomatique majeure entre Pékin et les républiques post-soviétiques d’Asie centrale.



La Chine : partenaire stratégique de l’Asie centrale

Les relations sino-centrasiennes se sont considérablement intensifiées au cours de la dernière décennie, dans le sillage de l’initiative « Belt and Road » lancée en 2013. La Chine est désormais le premier partenaire commercial de la région, et le Kazakhstan, au carrefour des routes terrestres eurasiatiques, incarne le point d’ancrage de cette coopération. Selon le ministère chinois du Commerce, le volume des échanges sino-centrasien a atteint 94,8 milliards de dollars en 2024, en hausse de 5,4 milliards su un an. Pour le seul Kazakhstan, la Chine représente plus de 18 % du commerce extérieur, consolidant sa position de second partenaire économique après la Russie.

« L’amitié éternelle » célébrée lors du sommet d’Astana

Le sommet d’Astana a été marqué par une série d’annonces précises, traduisant la densité croissante des liens stratégiques sino-centrasiens.

Signature d’un traité de coopération durable
Les dirigeants ont officialisé un traité d’« amitié éternelle et de bon voisinage permanent », visant à structurer durablement leur coopération politique, économique et sécuritaire. La formule, hautement symbolique, vient ancrer une diplomatie de long terme entre Pékin et les États d’Asie centrale.

Accords bilatéraux sino-kazakhs
Avec le Kazakhstan, la Chine a signé 24 accords intergouvernementaux portant sur :
    • les énergies renouvelables (hydrogène vert, efficacité énergétique),
    • l’industrie agroalimentaire (usine de blé à Akmola, centrale de maïs à Zhambyl),
    • les infrastructures logistiques (liaisons ferroviaires, douanières et aériennes),
    • la santé publique, les services numériques et la culture (programme Silk Way Star, échanges artistiques).
Ces accords s’inscrivent dans une stratégie conjointe de développement industriel et de connectivité régionale, consolidant le rôle du Kazakhstan comme plateforme continentale.

Fonds de développement et connectivité
La Chine a annoncé la création d’un fonds de développement régional de 1,5 milliard de yuans (environ 209 millions USD) destiné à financer des projets dans les domaines du transport, des technologies et de la coopération énergétique. En parallèle, les six États ont convenu de faciliter la mobilité des biens et des personnes via la suppression d’obstacles douaniers, la numérisation des visas et la coordination des transports ferroviaires et aériens.

Le Kazakhstan affirme son rôle de carrefour diplomatique régional

La tenue successive à Astana du sommet Chine–Asie centrale et du dialogue Inde–Asie centrale (le 20 juin), ainsi que la visite de plusieurs représentants européens ces derniers mois, illustrent la montée en puissance géopolitique du Kazakhstan. Astana parvient à se positionner comme interface entre les blocs mondiaux, renforçant son autonomie stratégique.

Le président kazakh Kassym-Jomart Tokaïev a réaffirmé à cette occasion sa volonté de faire du Kazakhstan un « modèle de coopération pacifique et de stabilité régionale ». En défendant une diplomatie multivectorielle, le Kazakhstan cherche à diversifier ses partenariats, équilibrer les rapports de force et éviter toute dépendance exclusive, notamment vis-à-vis de Pékin ou Moscou.
 

Et si la France réactivait son dialogue avec l’Asie centrale ?

L'intensification des partenariats sino-centrasiens soulève une question stratégique : la France a-t-elle intérêt à relancer un format structuré de dialogue avec l’Asie centrale ? La réponse semble être affirmative au vu des précédents historiques et des complémentarités économiques. En mars 2017, un premier sommet France–Asie centrale s’était tenu à Paris, réunissant les ministres des Affaires étrangères autour des thématiques de sécurité, développement, patrimoine et environnement. Plus récemment, en novembre 2024, la visite d’État du président Tokaïev à Paris a permis de signer de nouveaux protocoles d’accord dans les domaines des mines, du numérique, de l’IA, des infrastructures et de l’agriculture durable.

Sans compter que la France est aujourd’hui le troisième investisseur au Kazakhstan (via Orano, TotalEnergies, Alstom, Veolia) et joue un rôle actif dans la transition énergétique et les projets d’interconnexion. Elle bénéficie aussi d’une image favorable grâce à sa présence culturelle (Sorbonne-Kazakhstan, Alliance Française) et sa diplomatie.

Tandis que la Chine consolide ses acquis, et que la Russie conserve une influence résiduelle, les pays centrasiatiques cherchent à élargir leur spectre de partenariats. Le Kazakhstan, pivot régional affirmé, apparaît comme l’interlocuteur idéal pour servir de passerelle entre Paris et la région.

François Lapierre




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