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Findus et la crise du Horsegate, un modèle du genre ?




Vendredi 3 Avril 2020


« Findus tourne la page du Horsegate », « Findus et le ‘chevalgate’, une réaction exemplaire », « Communication de crise : Findus gagnant ! », près de 7 ans après la crise dite du Horsegate, Findus apparaît comme un modèle dans sa gestion et sa communication de crise.



(credit: fatuousplatitudes/Flickr)
(credit: fatuousplatitudes/Flickr)
En ayant fait le choix d’une totale transparence dans une crise européenne qui menaçait dangereusement son image, Findus a effectué un pari risqué qui, a posteriori, s’est avéré payant. En se posant comme victime, la marque a pu transférer la responsabilité sur d’autres acteurs et donc conserver une innocence juridique. Alors que l’affaire était présentée au printemps 2013 comme une « affaire Findus », le groupe a pu, par une abondante communication, retrouver une relation de confiance avec ses consommateurs.
Cependant, son image n’en demeure pas moins écornée et le coût économique, s’il est difficilement chiffrable, est extrêmement élevé. Deux millions d’euros ont été dépensés en tests ADN et en audit chez ses fournisseurs et, alors que le groupe attendait une croissance de 10% en 2013, il a dû revoir ses ambitions à la baisse avec une croissance limitée à 3%.
 
Dès lors, la gestion de crise de la part de Findus a-t-elle été idéale ? Quels étaient précisément les enjeux de Findus dans cette crise? La marque aurait-elle pu choisir une approche différente ?
 
Rappel historique de la crise

La crise qui sera qualifiée plus tard de Horsegate trouve son origine en Irlande du Nord. En septembre 2012, Alan Reilly, directeur de l'autorité de sécurité alimentaire irlandaise, lance une série de tests qui met en lumière la présence d’ADN de cheval dans la viande de bœuf vendue dans les îles britanniques. Le 16 janvier 2013, le scandale éclate dans les médias britanniques et pointe la présence de viande chevaline, jusqu’à 29% dans des steaks hachés « pur bœuf » de Tesco, Iceland et Lidl.

Ce n’est qu’un mois plus tard que l’affaire arrive en France avec le « scandale des lasagnes Findus ». Le 7 février, la marque rend public des analyses ADN réalisées par elle-même révélant la présence, jusqu’à 100%, de viande chevaline dans ses produits préparés comme ses lasagnes ou ses moussakas. Comigel, le sous-traitant de Findus dans la préparation des plats cuisinés, est mis en cause et riposte immédiatement en portant plainte contre X. La filière est en réalité complexe et mérite que l’on s’attache sur certaines parties de la chaîne de production. L’abattage et la découpe de la viande sont effectués en Roumanie. Intervient l’intermédiaire commercial Spanghero qui est spécialisé dans le négoce de viande. Comigel achète la viande à Spanghero et prépare des plats cuisinés pour Findus mais aussi pour Picard ou Tesco. Findus et Picard, eux, achètent en gros et revendent aux intermédiaires de vente. La différence entre les deux acteurs se trouvant dans le fait que Findus revend en gros aux hypermarchés et Picard revend au détail dans ses propres magasins. Si c’est d’abord Findus qui essuie la crise en étant accusé par les médias de n’avoir aucun contrôle sur sa filière, ce sera finalement Spanghero qui sera mis en cause pour avoir falsifié des rapports concernant la viande vendue. 

Analyse de la gestion de crise par Findus

Pour décrire sommairement la communication de crise de Findus, on pourrait noter l’utilisation de médias et de techniques de communication résolument modernes mais avec un manque de savoir-faire et d’anticipation. Pourtant, Findus paraissait armé pour répondre à cette crise : les tests ADN avaient été réalisés par la marque et c’était une volonté de cette dernière de les communiquer aux instances de contrôle ainsi qu’aux médias. Cette volonté de transparence a été de leitmotiv de la gestion de crise de Findus. Il s’agissait pour le groupe de conserver une relation de confiance avec leurs consommateurs en insistant sur leur volonté de coopérer pour faire la lumière sur cette affaire et en se posant en tant que victime de ses sous-traitants négligents, Comigel dans un premier temps puis Spanghero. Cette attitude n’en demeurait pas moins risquée car le nom de la marque était dès lors associé au scandale : le Horsegate devenait L’affaire Findus. La victoire médiatique de Findus est alors passée par sa relation avec la presse, notamment grâce aux interventions précieuses, de son directeur général Matthieu Lambeaux. Il a d’ailleurs décrit le positionnement stratégique de la marque en octobre 2013, près de 8 mois après la sortie de la crise comme ceci : « Certains communicants de crise nous conseillaient de ne surtout pas parler. Nous avons estimé, au contraire, qu'en tant que marque, nous ne pouvions pas nous taire. Nous avons donc choisi la transparence, estimant que nous n'avions rien à cacher. » Findus communique tous azimuts.

Cependant, Findus a également montré certaines limites dans son utilisation des moyens plus modernes de communication. En effet, le pendant de la volonté de transparence de Findus a été le tôlé qu’a subi le groupe sur les médias sociaux. Un en particulier s’est retrouvé dans l’œil du cyclone : le compte Twitter de la marque. Suite à la publication de tweets maladroits, il a finalement été supprimé et Findus a affirmé qu’il s’agissait d’un faux compte. La page Facebook a, elle, été totalement nettoyée, aucune publication de l’année 2013 n’y apparaît mis à part un article montrant la marque comme révélatrice de l’affaire. Cette communication manquant cruellement de subtilité a été largement moquée sur les réseaux sociaux. Findus s’est finalement résolu a faire appel à une entreprise d’e-réputation pour noyer le net sous les informations positives sur la marque, faisant ainsi passer au second plan les articles à charge.

Comparaison avec l’approche de Picard dans la gestion de cette crise alimentaire

Picard, également client de Comigel, est lui aussi touché par la crise. La marque adopte cependant une position radicalement différente de celle de Findus et plus old school de communication rare et choisie. Un communiqué de presse et une interview du président aux « Echos » suffisent à Picard. Le groupe privilégie la communication direct avec ses clients en envoyant deux e-mails à une liste d’environ 500 000 consommateurs ciblés. Ils changent néanmoins leur positionnement face aux « grands médias » lorsque leur président, après deux semaines difficiles en termes de ventes pour le groupe, prend la parole sur RTL.

Si Findus n’a pas réussi sa communication sur les réseaux sociaux, c’est au niveau de la communication interne que Picard a montré des limites. Le directeur d’un établissement de l’ouest parisien déclare en effet : «Il nous a manqué un message clair de la direction nous indiquant comment répondre aux réactions parfois violentes des clients ». La gestion de la crise chez Picard n’a pas été catastrophique, ses ventes progressaient de 10% en avril, mais le parti pris était différent de celui de Findus : moins communiquer, faire profil bas et conserver le principe de la parole rare.
 
Ainsi, la gestion de la crise européenne du Horsegate par Findus s’est appuyée sur deux principes : la transparence via une abondante communication et la victimisation en déplaçant la responsabilité sur des acteurs en amont de la chaîne de production. Cette stratégie risquée a montré son efficacité dans l’objectif de retrouver la confiance des consommateurs mais s’est heurtée à des erreurs dans l’utilisation des moyens modernes de communication comme les réseaux sociaux.

Sources :

La Rédaction




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